La Lune et les étoiles
Changer.
De poste, de travail, de vie, peu importe, mais changer.
Certes, mais pour quoi ?
D’un côté, il y a ce que l’on est et qu’on n’aime plus.
De l’autre, il y a ce qu’on aimerait être mais qu’on n’est pas.
Généralement, on considère que la réussite consiste à atteindre cet idéal, mais en réalité c’est complètement faux. C’est même l’inverse qui se passe le plus souvent : on se focalise tellement sur l’idéal à atteindre qu’on néglige tout ce qui nous en sépare, y compris (et surtout !) des opportunités qui auraient pu pourtant nous convenir.
D’ailleurs, il est fréquent, une fois l’idéal atteint, qu’on se rende compte que, finalement, ce n’est pas aussi bien que ce qu’on imaginait. L’herbe de l’autre côté de la colline n’est jamais aussi verte que dans nos rêves. Pire encore, on se rappelle alors le chemin parcouru pour y arriver, et surtout les choses qu’on a laissées sur le bord de la route, qu’on a volontairement évité de regarder de peur qu’elles nous détournent de notre objectif final, auxquelles on n’a pas accordé la moindre chance de nous plaire et qui auraient pu pourtant nous satisfaire.
Non, le bonheur n’est pas dans l’idéal, car ce dernier est le plus souvent marqué de l’empreinte de notre imagination, à la fois saturé de nos espoirs et fantasmé, magnifié, exagéré pour nous donner la force de l’atteindre. Ne dit-on pas que le mieux est l’ennemi du bien ? L’acceptation d’un possible compromis, l’ouverture à l’imprévu, voilà où réside le vrai bonheur. Je ne dis pas que l’idéal est inutile, il sert souvent de catalyseur, de moteur pour nous aider à avancer. Mais il est rarement un but en soi. Combien sommes-nous à réellement exercer le métier dont nous rêvions plus jeunes, et pour lequel même nous avons pu faire des études ?
La vie est un voyage dont la destination nous est malheureusement connue à l’avance ; nous ne devons pas nous focaliser sur le terminus mais au contraire profiter du trajet pour découvrir tout ce que le chemin nous offre d’opportunités, de possibilités, d’inattendu. Lorsqu’on envisage de changer de job, c’est un peu la même chose : la décision de changer est comme une naissance qui nous lance dans le vaste monde des autres choix qui nous restent. Il est sain de se choisir un but, car ce dernier nous donne la direction à suivre, l’impulsion nécessaire pour avancer, mais il ne doit pas nous aveugler et nous empêcher de voir ce qui nous entoure à chacun de nos pas.
En visant les étoiles qui brillent à des millions d’années-lumière d’ici, je n’aurai sans doute pas assez d’une vie pour en atteindre une seule, mais il y a de grandes chances pour que j’arrive sur la Lune. Et c’est déjà pas si mal.